samedi 27 février 2010

Sylvie Testud ravigote les combats de Louise Michel

La réalisatrice Solveig Anspach apprend vite et bien. Subtilement, elle a su mettre en valeur les multiples talents de Louise Michel (1830-1905), cette formidable combattante anarchiste, féministe, antiraciste et anticolonialiste qui était par ailleurs institutrice, botaniste, ethnologue, poétesse, infirmière… « Ce qui est passionnant avec Louise Michel, c’est que cette femme est totalement moderne, à l’écoute du Monde qui l’entourait, des gens et de la Nature, explique Solveig Anspach. Ce que nous avons essayé de faire, d’abord avec Jean-Luc Gaget (mon co-scénariste) puis après avec Sylvie, c’est de nous dire « en quoi cette femme peut raisonner en nous et qu’est ce qui va faire qu’on va pourra s’identifier à elle, et donc se sentir à sa place ? »

Les premières secondes du film nous ramènent au 16 décembre 1871. Ce jour-là, Louise Michel passait en procès pour son ardente participation à la Commune de Paris (18 mars – 28 mai 1871). Les bouchers versaillais n’étaient pas rassasiés avec les tueries de la Semaine sanglante qui avaient massacré le peuple montant « à l’assaut du ciel », comme disait Karl Marx. Les survivants risquaient gros. « J'appartiens tout entière à la révolution sociale, et je déclare accepter la responsabilité de mes actes, lança Louise Michel à ses juges. Si vous n’êtes pas des lâches, tuez-moi ! » Louise fut condamnée à la déportation en Nouvelle-Calédonie.

Après un long périple sur le Virginie, la déportée Louise Michel arriva sur la presqu’île de Ducos en 1873. Henri Rochefort et Nathalie Lemel étaient du voyage. D’autres communards les avaient précédés. Parmi eux, Charles Malato, un journaliste anarchiste. Des chants révolutionnaires réconfortaient les vaincus : « C’est la canaille, et bien j’en suis ! » En métropole, c’était la débandade. Gustave Flaubert, Théophile Gauthier, Georges Sand et consorts crachaient sur la Commune. « Ces clubs d’écrivains, tous des lâches comme toujours », pestait Rochefort.

Le décor calédonien est paradisiaque, mais pas pour tout le monde. Brutalités, exécutions, privations de nourriture, censure… rythmaient les semaines des déporté-e-s. Habillée en noir, « parce que je porte le deuil de la Commune », Louise Michel soignait les hommes, les animaux… et les plantes. Elle affrontait militaires et curés, « l’homme ne sera jamais libre tant qu’il n’aura pas chassé Dieu de sa raison ». Les déportés politiques qui prêtaient main forte à l’armée pour mater la révolte des Kanaks la remplissaient aussi d’horreur et de dégoût, « parfois je désespère de l’être humain ».

Amie et solidaire des Kanaks, Louise apprit leur langue et leurs coutumes. Elle alla jusqu’à publier des légendes kanakes. Son rêve, inaccompli, était d’ouvrir une classe mêlant enfants européens et mélanésiens. Les mentalités n’étaient pas prêtes. À la fin de son séjour forcé, consacrant sa semaine aux écoliers blancs de Nouméa, la « dame aux chats » réserva donc ses dimanches aux « nuées » de jeunes kanaks. Elle se lia également avec les révoltés kabyles déportés.

De son exil, Louise écrivait beaucoup. À Victor Hugo avec qui elle correspondait depuis sa jeunesse. À Georges Clémenceau qui milita pour l’amnistie des Communards... avant de devenir ministre de l’Intérieur, le furieux Tigre qui réprima dans le sang la révolte des vignerons en 1907 et les grévistes de Draveil en 1908. Le film nous la montre écrivant aussi au président de la République pour l’insulter tous les 28 du mois en mémoire de son compagnon Théophile Ferré qui fut exécuté le 28 novembre 1871.

Après l’amnistie générale de juillet 1880, la colère de Louise Michel ne se calma pas. Entre congrès et meetings anarchistes européens, manifestations de chômeurs et séjours en prison, éditions de livres et rédaction d’articles, sa vie fut terriblement tumultueuse. Louise mourut à Marseille le 5 décembre 1905 au retour d’une série de conférences en Algérie. Promesse faite aux insurgés kabyles rencontrés en Nouvelle-Calédonie. Cent vingt mille personnes bouleversées suivirent son enterrement. Révolutionnaire et romantique, l’Insoumise assurait que « la révolution sera la floraison de l’humanité comme l’amour est la floraison du cœur ».

« J’ai l’impression que la Commune, au sens large, et Louise Michel en particulier, résonnent très fort aujourd’hui, souligne Solveig Anspach. Elle dit des choses qui font écho à ce que vivent aujourd’hui les gens au quotidien, pas seulement les femmes, mais les gens dans la misère, les ouvriers, les travailleurs ou les sans-papiers. »

Tournée en Nouvelle-Calédonie (un choix symbolique très fort) avec des acteurs Kanaks dans le rôle de leurs ancêtres, dont Daoumi, voici une fiction intelligente qui frôle d’assez près la réalité d’hier... et d’aujourd’hui. « Ce n'est pas une miette de pain, c'est la moisson du monde entier qu'il faut à la race humaine, sans exploiteur et sans exploité », affirmait la rebelle finement incarnée par Sylvie Testud. En 2010, les aspirations égalitaires de la militante qui n’était ni vierge ni rouge résonnent encore dans ce monde hanté par des pouvoirs médiocres et criminels. « Le pouvoir est maudit et c'est pour cela que je suis anarchiste », résumait Louise Michel. CQFD.

Louise Michel la rebelle, un film de Solveig Anspach avec Sylvie Testud, Nathalie Boutefeu, Bernard Blancan, Alexandre Steiger, Augustin Watreng, Éric Sauvion-Caruso… d’après un scénario original de Jacques Kirsner et Michel Ragon. Durée 1h30. Diffusion le 6 mars, à 20h35, sur France 3. Sortie en salles le 7 avril.

Paco, 27 février 2010.

http://www.lepost.fr/article/2010/02/26/1961883_sylvie-testud-ravigote-les-combats-de-louise-michel.html

jeudi 25 février 2010

Devenir métropolitain. Politique d’intégration et parcours de rapatriés d’Algérie en métropole (1954-2005)



Ce livre retrace l'histoire du parcours des rapatriés d’Algérie, leur mutation en métropolitains, et révèle la première politique d'intégration de l'État faite à l’intention de migrants. Inédite, cette étude fait aussi entendre la voix des rapatriés.

En posant la question de l'action de l’État français dans le « devenir métropolitain », Yann Scioldo-Zürcher montre une vigoureuse politique d’intégration à l’œuvre qui dément à la fois une histoire trop larmoyante et met au jour l’action de l’État. Pour comprendre cette histoire d’une émigration/immigration/installation, Yann Scioldo-Zürcher revient d’abord sur les populations présentes en Algérie coloniale et les conditions dramatiques du départ.

Yann Scioldo-Zürcher, Devenir métropolitain. Politique d’intégration et parcours de rapatriés d’Algérie en métropole (1954-2005), Editions EHESS, 464 pages, 2010

Dictionnaire Algerie - France


L’Algérie et la France, dictionnaire coordonné par Jeannine Verdès-Leroux, Paris, Editions Robert Laffont, collection Bouquins, 901 pages, 2009.

Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier


L'histoire de l'Algérie durant sa colonisation par la France fait l'objet de controverses passionnées où la question sociale redevient centrale. Appartenant à la série Maghreb du Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier, cet ouvrage présente les figures politiques, syndicales, intellectuelles qui ont marqué l'Algérie du milieu du XIX siècle jusqu'à 1962.
Fruit de vingt ans de recherche, ce dictionnaire biographique ouvre un champ d'études original car l'Algérie, comme tout le Maghreb, est le lieu d'interférence de trois types de militants : les Européens d'Afrique du Nord en majorité français qui introduisent le syndicalisme et le socialisme sans toujours remettre en cause le régime colonial ; les nationaux qui deviennent majoritaires et s'engagent progressivement dans la lutte pour l'indépendance, les émigrés qui, travaillant en métropole, sont au croisement de ces deux inspirations.

René Gallissot est professeur émérite de l'université de Paris 8. Il a dirigé l'ouvrage Mouvement ouvrier, communisme et nationalismes dans le monde arabe (Éditions de l'Atelier, 1978).

René Gallissot, Engagements sociaux et question nationale - De la colonisation à l'indépendance de 1830 à 1962 Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier : Maghreb, Les Editions de l'Atelier, 605 pages, 2007.

Le nationalisme algérien avant 1954

9782271068682

Comment comprendre l’Algérie d’aujourd’hui à moins d’un retour critique sur l’histoire ? Ce livre réunit neuf des premières études de Benjamin Stora qui gardent leur pertinence et éclairent comme jamais l’actualité. C’est toute la complexité et la pluralité du nationalisme algérien dans sa phase de constitution entre 1920 et 1954 qui est ici montrée. En quoi les débats de la période 1935-1938 avec le Front populaire et le mouvement communiste se retrouveront-ils dans la guerre d’Algérie ? Quel rôle a joué l’islam ? Comment, à travers les contradictions régionales, a percé la conscience nationale ? Pourquoi la représentation paysanne dans la marche du nationalisme est- elle demeurée faible ? Quelle est la signification des affrontements idéologiques qui ont traversé la direction de l’organisation nationaliste à la veille du 1er novembre 1954 ? Comment se sont organisées les « batailles de mémoire » entre dirigeants pour consolider une légitimité historique ?

Toutes ces questions décisives ouvrent sur une compréhension du présent. Un volume exemplaire où se laisse voir la genèse intellectuelle d’un des plus grands spécialistes de l’Algérie et qui ouvre, de façon surprenante, sur une saisie renouvelée du présent.

Benjamin Stora, Le nationalisme algérien avant 1954, CNRS Editions, 346 pages, 2010

dimanche 14 février 2010

"Entre Algérie et France"

Magazine "Entre Algérie et France", lieu de rencontres et territoire d'échanges entre cultures.

Si vous souhaitez participer à une e-terview, voici les 20 questions. Vous pouvez envoyer par mail votre e-terview : algerieetfrance@yahoo.fr. N'hésitez pas également à laisser vos commentaires aux différents articles du magazine web "Entre Algérie et France".

L'équipe de "Entre Algérie et France"



LES QUESTIONS DE L'E-TERVIEW :

1/ Quelle est l’origine de votre arrivée en Algérie ? A quelle époque date l’installation de
votre famille en Algérie ?
2/ Quels étaient vos liens avec les Algériens lorsque vous étiez enfant puis adulte ?
3/ Quelles ont été les conditions de travail de votre famille en Algérie ?
4/ Cinq mots commençant par la première lettre de votre prénom ?
5/ Faîtes moi part d'un de vos souvenirs d'Algérie ?
6/ L’indépendance était-elle inévitable ?
7/ Que pensez-vous des gros propriétaires terriens "colons" français ?
8/ Quels sont vos sentiments à propos de l’OAS ?
9/ Que pensez-vous de De Gaulle ?
10/ Cinq mots pour définir votre Algérie ?
11/ Qu’est-ce qu’une personne déracinée selon vous ?
12/ Que pensez-vous du FLN ?
13/ Que pensez-vous des français de métropole lors de la guerre d’Algérie ?
14/ Faîtes moi part de vos conditions d’arrivée en métropole ?
15/ Lors de cette arrivée par quoi avez-vous été vous le plus surpris ?
16/ Quelles ont été vos déceptions ? Quelles étaient vos aspirations lors de l’arrivée en métropole ?
17 / Avez vous un message à faire passer aux Algériens ?
18/ La France (la métropole) est-elle après toutes ces années votre pays ? Expliquez pourquoi ?
19/ Qu’est-ce que l’intégration selon vous ? Les Pieds Noirs ont-ils été intégrés ? S’il y
a eu intégration ou s’il n’y a pas eu intégration, quelles en sont les raisons selon vous ?
20/ Par quoi avez-vous envie de terminer votre E-terview ?

samedi 6 février 2010

Jean Sénac - Le Soleil assassiné

Le poète Jean Sénac, également animateur de radio, est un Pied-noir qui a choisi de rester en Algérie après l'indépendance de son pays en 1962. Dix ans plus tard, il est surveillé par la police du régime. Ses poèmes attirent un public populaire et son émission rencontre un véritable succès auprès de la jeunesse. Aussi, quand Hamid et Belkacem, deux étudiants, apprennent que la pièce qu'ils ont écrite et présentée au premier festival national du théâtre algérien est déclassée sous prétexte qu'ils l'ont jouée en français, leur peine va être atténuée par la présence en coulisses de Jean Sénac qui les félicite. Ces derniers vont devenir des intimes du poète et assister à son combat pour la liberté et la culture de la jeunesse algérienne. Combat qui mènera Sénac jusqu'au martyre : une nuit d'août 1973, il est assassiné dans la cave qui lui servait d'appartement. Hamid est accusé du meurtre.

La genèse du projet.
A l'origine, le réalisateur Abdelkrim Bahloul souhaitait réaliser un documentaire sur Jean Sénac, qui avait su prédire selon lui les années sombres de la guerre civile qui toucha l'Algérie au début des années 90. Le projet de documentaire se transforma en fiction en 1996, lorsque se déroula l'assassinat des moines de Tibehirine. "J'ai éprouvé la même honte que celle ressentie lorsque j'avais appris l'assassinat de Sénac en 1973", explique Abdelkrim Bahloul. "L'idée que l'on s'attaquait lâchement aux plus fragiles, à ceux qui s'étaient installés parmi nous - en Algérie - pour partager notre labeur et nos peines m'était insupportable. Le film sur Sénac m'a paru d'autant plus nécessaire, urgent. Devant la difficulter à monter un documentaire, j'ai pensé à écrire une fiction qui s'inspirerait de la vie de Sénac.

Coup de projecteur sur Jean Sénac.
"Le Soleil assassiné" porte un regard sur l'Algérie à travers la figure du poète pied-noir Jean sénac, incarné dans le long-métrage par Charles Berling. Né en 1926 dans la région d'Oran, celui-ci fait ses débuts à Radio Alger puis se spécialise dans la poésie, fréquentant notamment Albert Camus. Après avoir adhéré au Front de Libération Nationale, Jean Sénac devient de plus en plus populaire : son émission de radio "Poésie sur tous les fronts" est un franc succès, notamment auprès de la jeunesse. Mais il agace le pouvoir en place par ses prises de positions en faveur des minorités, sa défense de la francophonie et son homosexualité affichée. Il est très vite renié par le régime qui l'amène à quitter sa villa et à mettre un terme à son émission. Jean Sénac meurt assassiné en 1973 dans des circonstances jamais élucidées.

Un petit tour par Venise.
"Le Soleil assassiné" a été présenté lors du Festival de Venise 2003. La même année, il a reçu le Golden Zénith du Festival du Film de Montréal. En 2004, le long-métrage faisait partie de la sélection de la Biennale du cinéma arabe à Paris.

http://www.toutelapoesie.com/poetes/jean_senac.htm

Mémoire de Pieds-Noirs

La vibration de la voix, l'empathie du discours, l'ampleur généreuse du geste ne pouvaient tromper. Oui, le général de Gaulle les avait compris et n'allait pas les abandonner, eux, ces pieds-noirs en plein désarroi qui avaient trouvé leur sauveur. C'était il y a 50 ans, le 4 juin 1958, sur le Forum à Alger. Le Général lançait son célèbre " Je vous ai compris ! ", déchaînant l'enthousiasme de la foule. Mais quatre ans plus tard, après avoir cru aveuglément que l'Algérie resterait française, un million de pieds-noirs prenaient le chemin de l'exil, payant ainsi tragiquement leur tribut au sens de l'Histoire. Cet ouvrage se propose de donner libre cours à la parole, si subjective soit-elle, de ces " rapatriés " que la France n'accueillit pas toujours comme les siens. De laisser affleurer les souvenirs, les émotions, les expériences les plus diverses d'une vie qui a pris fin pour eux il y a 45 ans.

Dominique Fargues, née en 1975, réalise des reportages et des documentaires d'histoire, de société et de culture pour la télévision. Elle a déjà coécrit, avec Arnaud Muller, Mémoires de mineurs (Flammarion, 2007)

Dominique Fargues, Mémoire de Pieds-Noirs, Flammarion, 2008.

Français du Maroc

Souvent d'origine méditerranéenne, de nombreuses familles ont vécu en Afrique du Nord à l'époque de la présence française. Ainsi les Conesa, Espagnols passés par l'Algérie. Leurs enfants, trois fils et une fille, Victorine, voient le jour en Oranie au début du XXe siècle. Les mariages entre nationalités sont alors monnaie courante : lorsque Victorine épouse Camille-Eugène Grouix, d'origine auvergnate, débute l'histoire franco-espagnole de cette famille. Or, tous les Pieds-Noirs ne sont pas algériens. A compter de 1928, cette vie nomade se poursuit dans un pays voisin, où d'autres Français ont vécu au temps du protectorat voulu par Lyautey. C'est là, dans une cité bâtie ex nihilo, que naît en 1941 Camille Grouix. Il passera dix-sept ans dans un pays qu'il quitte au temps de la décolonisation pour ne jamais y revenir. Il n'en parlera pas davantage. L'auteur a pourtant voulu creuser cet assourdissant silence. Car, trame et drame des jours, grande histoire et petites histoires, ces pages sont d'abord écrites par un fils. Elles sont, dirait Camus, une "recherche du père". En effet, si ce pays particulier est le Maroc, si cette ville surgie de rien s'appelle Fez-Ville Nouvelle, cet homme est son père.

Pierre Grouix , Une jeunesse marocaine : Français du Maroc, Editions du Rocher, 2008.

vendredi 5 février 2010

El-Biar - Reims : 2-0


L'Equipe - le 02/02/1957

El-Biar - Reims : 2-0 (16ème de finale)
Longtemps, très longtemps, la performance du Sporting Club Union d'El-Biar a servi de valeur étalon à tous les David triomphant des Goliath. Ce 2 février 1957, à Toulouse, un petit club algérois de division d'honneur réussit l'un des plus grands exploits de l'histoire du sport français en éliminant le grand Stade de Reims (2-0), finaliste de la Coupe d'Europe des clubs champions quelques mois plus tôt. Retour sur la surprise du siècle.

En cet hiver 1957, Alger vit dans la terreur. Arrivé à Toulouse-Blagnac, un des dirigeants du club algérois a cette réflexion : «Depuis vendredi, nous vivons dans une atmosphère de calme et de sérénité. Plus de couvre-feu, plus d'attentats au coin de la rue comme à Alger...». Guy Buffard, l'entraîneur-joueur d'El-Biar, est un admirateur du jeu rémois et un fan d'Albert Batteux. Peu importe l'issue de la rencontre, il attend avec impatience de pouvoir «échanger» avec son maître. Au cours de la discussion, Buffard demande à Batteux de ne pas se montrer trop impitoyable du côté du tableau d'affichage, si toutefois Reims prenait rapidement l'avantage. Au coup d'envoi, Reims est au complet, seul manque à l'appel, Just Fontaine, militaire sous le coup d'une mesure disciplinaire. Même les conditions de jeu sont favorables aux Rémois. Les amateurs sont habitués aux terrains secs et pierreux, rien à voir avec la tendre pelouse du Stadium de Toulouse, ils vont devoir changer de crampons.

Les joueurs d'El-Biar réussissent la meilleure entame de match possible. Ils ouvrent la marque, dès la 4e minute, sur un coup-franc de... Guy Buffard. Peu avant la 20e minute, Roland Almodovar prend de vitesse Robert Jonquet et marque. Menés 0-2, les Rémois s'énervent. A la mi-temps, l'euphorie s'installe dans le vestiaire algérien. Dans un coin reposent les bouteilles de champagne que le président rémois, Henri Germain, a offertes avant la rencontre. Certains veulent déjà «faire sauter les bouchons». La seconde période se résume à une attaque-défense, à sens unique. Reims fait le siège du camp algérois. Le gardien d'El-Biar, Paul Benoît, fait la partie de sa vie. Plus les minutes passent et moins El-Biar pense à jouer "à la rémoise". Benoît stoppe encore deux tirs de Bliard et Leblond. La nouvelle de l'inimaginable exploit fait le tour de la métropole et de l'Algérie. Henri Germain résume le match : «Nos adversaires tirent trois fois et marquent deux buts. Nos avants shootent à vingt reprises et manquent tout. C'est désespérant !» Le siècle est terminé, mais on n'a toujours pas fini de parler d'El-Biar...

LA FEUILLE DE MATCH
Le 2 février 1957, Toulouse (Stadium)
SCU EL-BIAR (DH) - STADE REIMS : 2-0 (2-0)
Buts : Buffard (4e), Almodovar (19e) pour El-Biar.
EL-BIARD : Benoît - Issaad, Florit, Baroni, Taberner, Lapasset, Buffard, Chakhor, Vidal, Baeza, Almodovar. Entr. : G. Buffard.
REIMS : R.-J. Jacquet - Penverne, Jonquet, Cicci - Leblond, Siatka - Hidalgo, Bliard, Glovacki, Piantoni, Vincent. Entr. : A. Batteux.

Football en Algérie


Roland Auvray,
Livre d'or du football Pied-Noir et Nord-Africain, Toulon, Les Presses du Midi, 1995.


Michel Nait-Challal :
Dribbleurs de l'indépendance. L'incroyable histoire de l'équipe de football du FLN algérien. Éditions Prolongations, 2008.

Sables d'exil, les républicains espagnols dans les camps d'internement au Maghreb (1939-1945)

Au coeur de l'OAS


Grâce à des archives inédites contenant les échanges de courriers et de nombreux rapports émanant de l'OAS, les copies de correspondances entre la délégation générale, l'Elysée et les préfets, ce livre permet enfin de retracer, sans légendes ni reconstitutions, et au quotidien, la vie de cette organisation clandestine et terroriste. L'ouvrage s'attache aussi à remettre en perspective la situation de l'OAS alors que la guerre d'Algérie s'achève. Le face-à-face entre l'OAS et l'Etat est saisissant. Les archives éclairent en particulier, sur fond de négociation des accords d'Evian, le choix et la mise en œuvre de la politique de la " terre brûlée " tout comme les réactions des autorités civiles et militaires qui ploient devant la force d'une OAS qu'elles n'ont jamais (de leur aveu même) réussi à infiltrer.

Olivier Dard est professeur d'histoire contemporaine à l'université de Metz. Il a publié plusieurs ouvrages parmi lesquels La Synarchie, le mythe du complot permanent (Perrin 1999) et Le Rendez-Vous manqué des relèves des années trente (PUF, 2002).

Olivier Dard, Voyage au coeur de l'OAS, Librairie Académique Perrin, 423 pages, 2005.

Albert Camus et l'Algérie


Entre Camus et l'Algérie existe un lien ténu. Cette « longue liaison qui sans doute n'en finira jamais » est la trame de sa vie, de son oeuvre et de ses engagements. Une liaison toujours heureuse, parfois difficile et contradictoire. Mais une liaison souvent menacée du fait de l'histoire et de la tuberculose que Camus devra assumer sa vie durant. Fardeau de la souffrance et de la mesure, cette maladie lui impose de vivre dans la précarité de l'instant conjugué à un futur toujours aléatoire. Écrivain, philosophe, moraliste, homme de théâtre et journaliste, Albert Camus n'a jamais voulu être un maître à penser. Tout juste un compagnon de vie que nous retrouvons ici, à travers cette Algérie dont il a tiré force et inspiration, mémoire et silence.

- José Lenzini, Camus et l'Algérie, Editions Edisud, 160 pages, 2010


L’Algérie demeure présente dans toute l’œuvre d’Albert Camus, en filigrane ou en pleine clarté. Il a toujours gardé au cœur l’inguérissable blessure d’un “monde de pauvreté et de lumière”. Mais ses textes, très lucides, parfois prémonitoires, ne sont pas toujours partagés par ceux, de part et d’autre de la fracture historique, qui vivent et meurent pour cette terre. Ce livre reprend les échanges des intervenants présents lors de la 20ème Rencontres Méditerranéennes Albert Camus. Cet ouvrage est issu des différentes interventions aux Journées des 10 et 11 octobre 2003, organisées au château de Lourmarin (Vaucluse) par l’association Rencontres Méditerranéennes Albert Camus. Cette 20ème Rencontre Méditerranéenne a notamment réuni, autour de la mémoire d’Albert Camus, cinq écrivains algériens contemporains Aziz Chouaki, Abdelmadjid Kaouah, Maïssa Bey et Alek Baylee Toumi, ainsi que Annie Cohen. Ceux-ci ont ouvert le dialogue et l’échange, autour d’un patrimoine littéraire commun entre les deux rives de la Méditerranée dont Albert Camus est un des représentants les plus prestigieux.

- Albert Camus et les écritures algériennes, Editions Edisud, 192 pages, 2004.
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Editions Edisud
Groupe Calade Diffusion
360, rue Famille Laurens
Pôle d'activité d'Aix-en-Provence
13854 Aix-en-Provence Cedex 3
www.edisud.com

mardi 2 février 2010

Alphabétisation

A quoi servent mes poèmes

Si ma mère ne sait me lire?
Ma mère a vingt ans
Elle ne veut plus souffrir
Ce soir elle viendra
Epeler mes lettres
Et demain elle saura
Ecrire
Emancipation.


A quoi servent mes poèmes
Si mon père ne sait me lire?
Mon père a cent ans
Il n’a pas vu la mer
Ce soir il viendra
Epeler mes lettres
Et demain il saura
Lire
Dignité.


A quoi servent mes poèmes
Si mon copain ne sait me lire?
Mon copain n’a pas d’âge
Il a vécu dans les prisons
Ce soir il viendra
Epeler mes lettres
Et demain il saura
Crier
Liberté.

Rachid Boudjedra